Dans cette guerre mondiale contre la pandémie, l’Europe n’est pas au rendez-vous de l’Histoire. Elle offre le spectacle pitoyable d’un combat en ordre dispersé où chaque gouvernement gère la crise sanitaire individuellement alors que le virus ne connaît pas de frontières et que les taux de mortalité par habitant en Italie ou en Espagne sont de dix à vingt fois plus élevés qu’en Allemagne. Les décisions de confinement d’abord, puis maintenant de déconfinement, sont prises sans la moindre coordination. Ces disparités et la désunion visible depuis les premiers jours de la crise ont bien sûr de graves conséquences humaines mais elles constituent aussi et surtout un échec politique majeur pour l’Europe qui, si rien n’est fait, pourrait y jouer sa propre existence.
L’incurie sanitaire est aujourd’hui aggravée par l’incapacité de l’Europe à répondre de façon décisive aux enjeux économiques et financiers de cette crise qui pourrait se traduire par la disparition de dizaine de milliers de PME et une destruction d’emplois comme nous n’en avons pas connue depuis les années Trente. L’adoption le 9 avril d’un plan d’aide européen à travers notamment le Mécanisme européen de stabilité est notoirement insuffisante au regard du choc subi. L’Italie a déjà fait entendre qu’elle n’utiliserait sans doute pas certains des prêts proposés car ils limitent la latitude des États bénéficiaires aux strictes conséquences sanitaires de la crise alors que les besoins vont bien au-delà. Le plan impose par ailleurs des contraintes lourdes en matière de gestion et de supervision des déficits, contraintes inappropriées étant donné l’urgence.